[INTERVIEW ALUMNI] : Antoine Contour
Architecte et cofondateur d’une agence tournée vers la réhabilitation, Antoine Contour partage son parcours et son expérience au sein du Mastère Spécialisé® TEC XX de l’ÉNSA Versailles. Motivé par l'urgence climatique et la nécessité de renouveler les pratiques du bâti existant, il explique comment la formation a renforcé sa compréhension technique, enrichi sa culture de l'architecture moderne et soutenu le développement de projets concrets.
Découvrez son témoignage…

Qu’est-ce qui vous a motivé à rejoindre le Mastère Spécialisé® TEC XX ?
Dès l’ouverture de notre agence en 2023, que nous voulions orienter vers la réhabilitation, mon collègue m’a parlé du TEC XX et de sa formation appliquée dans ce domaine. À l’heure d’une crise croisée, économique et écologique, où le sujet de la réhabilitation, autrefois parent pauvre de l’architecture, prend de plus en plus d’importance, nous souhaitions nous outiller à la fois techniquement et culturellement sur celle-ci.
Cela d’autant plus que ce marché en plein développement est traditionnellement assez peu exploré par les architectes. Concurrencés par les ingénieurs d’une part, et souvent impulsés par des questions de subventions d’autre part, leur rôle est généralement limité dans ce segment, et la qualité générale s’en fait ressentir. Ainsi, il nous semblait nécessaire de maîtriser les données thermiques, techniques et économiques, qui sont les données d’entrée dans ce genre de projet.
Par ailleurs, cette inscription s’inscrivait dans une appétence plus large pour l’architecture moderne, commencée à Mendrisio dans le cours de Franz Graf sur la Sauvegarde de celle-ci, à travers une approche à la fois scientifique et sensible. Souvent jugée laide, générique ou déracinée, accusée de créer des conditions sociales défavorables, l’architecture moderne est néanmoins porteuse de qualités indéniables de générosité, de luminosité et d’usage, et à ce titre, sa réhabilitation mérite une certaine finesse.
En quoi la formation TEC XX a-t-elle transformé votre approche de l’architecture et de la réhabilitation ?
Je pense que mon approche de l’architecture n’a pas fondamentalement changé, dans le sens où je suis convaincu que notre expertise transversale et sensible est et sera toujours d’actualité. En revanche, j’y ai compris que ce qui était attendu de nous était moins notre capacité à développer un concept novateur, ou à créer une perspective séduisante, que celle de diagnostiquer de manière globale une situation existante, de la transmettre au client, et d’arbitrer ensuite une juste sélection d’interventions qui permettent à la fois de préserver et d’améliorer le bâtiment existant.
Même s’il ne faut pas perdre de vue nos objectifs initiaux — créer des conditions d’habiter dignes, adapter le bâti au changement climatique, ou encore magnifier l’existant — comprendre ces mécanismes d’acteurs, ainsi que leurs attentes, permet de créer les conditions d’un projet architectural réussi. En cela, la formation possède une dimension opérationnelle majeure.
Par ailleurs, la formation, en entrant dans le bâtiment à travers un prisme technique, permet de déployer une culture globale de l’architecture moderne, avec non seulement sa dimension architecturale (principes de conception, perspectives sociales, adaptations locales, etc.), mais également les systèmes techniques (conduits de ventilation et de fumée, systèmes de chauffage).
Enfin, la formation a fait naître chez moi, si ce n’est une fascination, au moins un intérêt appuyé pour les systèmes constructifs, en particulier ceux apparus dans les balbutiements de l’architecture moderne de masse au début des années 50. Ces derniers retrouvent une étonnante actualité à l’heure où la suprématie du voile porteur en béton est remise en cause.
Quels sont vos projets actuels ? Avez-vous des réalisations en cours ou à venir en lien avec la rénovation et la réhabilitation ? Un projet coup de cœur à partager ?
Aujourd’hui, à l’agence, nous travaillons sur 4 projets de réhabilitation dont deux nés grâce au TEC ! Le premier est une copropriété de 186 logements de la fin des années 70, et le second est une résidence sociale de 72 logements gérée par Paris Habitat. Pour cette dernière, nous avons fait équipe avec Atelier MLH, qui a déjà une expérience forte dans le secteur de la réhabilitation. C’est un bâtiment de 1955, assez original, puisque construit à une période charnière entre l’urbanisme d’îlot et l’urbanisme de barre. Sa façade est typique de l’époque de la reconstruction, avec une structure à ossature où s’intercalent des panneaux préfabriqués en béton désactivé. Ces panneaux sont certes connotés, mais ils donnent à la façade son identité, ainsi qu’une forme de pérennité, puisqu’ils sont en parfait état 70 ans après. Le diagnostic, patient, documenté, mais surtout sur place (relevés et sondages), a permis de déceler et de mesurer un vide de construction de 8 cm entre les panneaux de façade et les parpaings de remplissage.
Le projet de rénovation globale (en cours) prévoit a priori une insufflation d’un isolant dans ce vide de construction. Cette solution, qui découle du diagnostic, permet à la fois de préserver l’identité architecturale du bâtiment, tout en restreignant les interventions à l’intérieur, toujours complexes en site occupé. Par ailleurs, le projet prévoit une requalification des celliers existants et leur intégration à la salle de bain, dans un double objectif d’amélioration thermique et d’actualisation des usages.
Il va sans dire que ces deux projets, plutôt importants pour une jeune agence, ont véritablement fait décoller notre activité.
Quels conseils donneriez-vous aux futurs candidats du Mastère TEC XX ?
Je distinguerais deux sujets : celui de l’apprentissage en tant que tel, et la dimension opérationnelle de la formation.
Une chose qui a bien fonctionné entre nous, car nous étions peu, était de suivre avec attention les sujets des autres apprenants. En effet, le choix des cas d’études choisis était assez représentatif des typologies modernes que l’on rencontre habituellement, et allait du HBM en brique à l’immeuble néo-moderne, en passant par l’architecture préfabriquée des Trente Glorieuses. Cela nous a permis de comprendre le fonctionnement de chacune de ces typologies, leurs potentialités, ainsi que leurs limites d’intervention et d’amélioration respectives.
La formation permet également d’obtenir un panorama à la fois de cette période de l’architecture, et des réhabilitations déjà effectuées. Relativement courte par rapport à l’ampleur du sujet, il est intéressant d’approfondir par soi-même la question, dans l’optique de se constituer une bibliographie, une base de données, et, de manière générale, une culture de l’architecture moderne.
De manière indirecte, le TEC est un réseau d’architectes, d’ingénieurs et d’autres spécialistes du bâtiment. Il permet de connaître, et surtout de se faire connaître de potentiels partenaires et de futurs donneurs d’ordre. Il y a donc une dimension réseau à ne pas négliger, d’autant plus que les intervenants sont souvent des gens à la fois passionnés et très qualifiés dans leur domaine.
Enfin, et de la même manière, les cas d’études proposés par des bailleurs ou des conseils syndicaux sont des sujets réels, avec de véritables attentes pour la suite. Le TEC permet d’établir patiemment une relation de confiance avec les donneurs d’ordre, et de constituer une connaissance solide et inédite du bâtiment, dans l’objectif de se positionner efficacement dessus par la suite.
Nous remercions chaleureusement Antoine Contour pour son témoignage.
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