Construire les mondes des co-existences - ÉNSA Versailles

L'appel de la forêt

Projet de master du 2ème semestre, encadré par Jean-Patrice Calori et Magali Paris

Einkunnir, Borgarnes, Islande / Photographie Magali Paris Avril 2023

Présentation

Entre modèles et écosystèmes, ce P45 propose une exploration architecturale de morceaux de nature où coexistent le sauvage et le cultivé, faune-flore et installations humaines. Une architecture peut-elle être bénéfique aux systèmes vivants ?
La forêt n’est pas le bois. La forêt est une masse : elle existe par son épaisseur, sa profondeur mais aussi sa consistance entre viscosité, opacité et densité. Territoire liquide, elle est le paradigme du lieu où temps et espace peuvent se dilater ou se contracter. Les écrivains et les artistes l’ont inscrite dans une dimension de mythe qui fabrique des archétypes – êtres et choses.
Sanctuarisée, elle échappe le plus souvent à l’acte de bâtir, mais un champ des possibles reste à explorer en posant la question de l’exogène et de l’endogène. La lisière, comme le cœur de la forêt, s’apparente à de possibles lieux d’expérimentation architecturale dont la nature est à définir.
En partant de cet état de fait, on pourra même tendre vers la notion de modèle architectural de forêt, que certains architectes ont déjà exploré à l’échelle de l’édifice et au-delà. Pour cela, on propose d’adopter en particulier la perspective des sciences du vivant pour lire les systèmes existants et en composer de nouveaux. Afin de tester cette hypothèse, on s’intéresse chaque année à des forêts différentes tant dans leur morphologie et contexte que dans les enjeux contemporains qui les transforment.

Programme 2023 - Direction l’Islande

Les forêts sont si rares ou si jeunes en Islande qu’il suffirait au promeneur perdu au milieu des bois de se mettre debout pour se repérer. Pourtant au IXe siècle, avant la colonisation viking, les forêts couvraient 40% du territoire, chiffre tombé à 0,5% au début du XXe. Depuis la seconde moitié du XXe une campagne de reboisement massive est entreprise et s’intensifie ces 30 dernières années, elle semble profiter du changement climatique à l’œuvre et dessine de nouvelles possibilités d’architectures spéculatives.

Trois outils de conception seront mobilisés dans l’atelier : les représentations littéraires et picturales, l’approche située et la référence afin de donner forme à des programmes qui soient tout à la fois le support d’hétérotopies, l’expression d’un génie du lieu et le terrain d’une discussion critique et fertile.

L’atelier est structuré en 3 temps.
1.Explorations littéraires et picturales. On prend le pari d’une appropriation du thème de travail par les contes, romans, films, peintures et dessins qui racontent l’univers de la forêt.
2.Genius Loci. Voyage d’études en Islande dont l’objet est un travail de terrain créatif en évitant l’écueil de la conservation « C’est dans la transformation de ce qui est déjà-là qu’est l’invention. Tout ce qui fige les choses les tue » (Georges Descombes à propos de la renaturation de l’Aire 2000-2016).
3.Synthèse programmatique. Maquettes, dessins et écriture - personnels à chaque étudiant - sont mobilisés conjointement pour construire une problématique qui saura faire projet. L’invention programmatique est encouragée à travers de nécessaires décentrements mettant en jeu les questions du vivant, des ressources, des mutations paysagères.

Tout au long du semestre, on propose de construire ensemble une culture de la forêt comme paradigme architectural en explorant - par des études de références et par des rencontres avec penseurs et professionnels - les positionnements différenciés et les rapprochements d’un ensemble d’architectes du XXe et de la scène contemporaine internationale de ces 20 dernières années. A l’occasion du voyage pédagogique, dans le cadre d’un workshop en partenariat avec les universités LHI (architecture) et LBHI (paysage, urbanisme et foresterie) à Reykjavik, conférences et débats seront organisés avec des professionnels et aussi entre étudiants autour de travaux en cours. La référence est mobilisée dans l’exercice de projet comme matière analogue ou non pour construire une problématique, un positionnement personnel sur les conditions de composition de l’architecture par le vivant.